Introduction


Pauline LE VOT, Chargée d’étude «Femmes et ruralité» au Centre Hubertine Auclert

L’étude « Femmes et ruralité » a débuté l’année dernière, sous l’impulsion de la présidence du Centre, avec deux rencontres en mai et en décembre qui ont permis de dessiner les contours des problématiques à creuser en 2018. Une revue de la littérature au niveau national et régional a permis de recueillir nombre de données chiffrées. Puis des entretiens ainsi que trois rencontres avec des experts, des acteurs et élus locaux, ont précisé les problématiques.

C’est aujourd’hui la troisième rencontre, après une première à Étréchy le 31 août pour parler de la participation des femmes à la vie locale (vie politique, activités culturelles et sportives), puis à Coulommiers le 25 septembre, sur l’articulation entre vie professionnelle et vie personnelle dans les territoires ruraux.

Notre démarche se prolongera l’an prochain avec un questionnaire qui sera distribué aux élus locaux. Le but final est de rédiger des préconisations et de mettre en lumière les bonnes pratiques, afin que les collectivités locales puissent se saisir de cet enjeu dans les zones rurales. Un rapport sera alors publié en 2019.

Quels sont les enjeux de la rencontre d’aujourd’hui?

  • Accompagnement des femmes victimes de violence

Les taux de violence conjugale, par un conjoint ou un ex-conjoint, sont identiques en milieu rural et urbain, avec 1,8 %. Mais la différence se situe dans l’accompagnement. En zones rurales, on constate un paradoxe lié à la proximité. Etant donné qu’il s’agit de petites communes où les gens se connaissent, les femmes hésitent encore plus à prendre la parole et se sentent encore plus isolées.

Dans les zones rurales, les femmes qui cherchent de l’aide se tournent principalement vers le corps médical mais vont rarement voir, en plus, la gendarmerie ou des associations. Seules 7 % des femmes en zones rurales victimes de violences vont voir à la fois le corps médical et la gendarmerie, contre 17 % en zones urbaines. Celles qui s’adressent à la fois au corps médical, à la gendarmerie et à une association ne sont plus que 1,3 % en zones rurales contre 10 % en milieu urbain. Pour la prise en charge et l’hébergement, là aussi une différence notable est constatée, de par l’éloignement des associations et la rareté des structures spécialisées pouvant accueillir ces femmes.

  • Accès au droit

Les structures qui ont pour but de faciliter l’accès au droit pour les citoyennes et les citoyens sont généralement implantées dans les zones urbaines. En Ile-de-France, seulement 9,7 % des points d’accès aux droits sont situés en zones rurales, et seulement 6 % des Maisons de Justice et du Droit. Pourtant, 69 % des communes franciliennes sont considérées comme rurales.

Le manque d’information sur les dispositifs d’aide est l’une des premières causes de non recours au droit, avec la complexité des démarches administratives. C’est d’autant plus le cas dans les zones rurales où l’accès à Internet est moins évident pour une population souvent plus âgée, ainsi que pour les personnes ayant des difficultés à lire et écrire le français.

  • Accès aux soins

Enfin, l’accès aux soins médicaux est rendu difficile en zones rurales du fait d’une offre de soins plus faible et plus dispersée, surtout lorsque l’on s’intéresse à certaines spécialités et pathologies.

En moyenne en France, il faut 15 minutes pour se rendre à une maternité, mais pas moins de 30 minutes en zones rurales. Dans certains territoires, le délai pour obtenir un rendez-vous avec un ou une gynécologue peut monter à deux mois et demi. Un délai bien trop long, notamment lorsqu’il est question de grossesse non-désirée ou de traitement d’une MST.

La densité des médecins généralistes et spécialistes à ne pas pratiquer le dépassement d’honoraires est plus faible en Ile-de-France que dans le reste du pays (y compris en zones urbaines). Pour 100 000 habitants, seuls 52 médecins généralistes ne pratiquent pas le dépassement d’honoraires en Ile-de-France, contre 76,5 au niveau national. Dans la Seine-et-Marne, département plutôt rural, la proportion tombe à 46,3 médecins pour 100 000 habitants.

En 2018, seulement 25 % des franciliens et des franciliennes qui vivent en milieu rural se disent satisfaits de l’accès aux soins et aux professionnels de santé.

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